Le Conseil fédéral a édicté les très attendues ordonnances qui concrétisent la loi fédérale sur l’énergie votée le 21 mai 2017. Désormais, un « parc éolien » de seulement 4 machines sera considéré comme étant d’« intérêt national ». Loin du bon sens, cette interprétation juridique de la loi est une trahison grave de son esprit et de la volonté populaire.
L’ordonnance sur l’énergie édictée ce jour par le Conseil fédéral fixe à 20 GWh la production annuelle d’un parc éolien pour qu’il puisse être érigé au rang d’intérêt national. Une poignée de 4 éoliennes pourra donc être imposée au nom de l’intérêt national. Ce chiffre représente à peine 1.2 pour mille de la consommation annuelle d’électricité. Mettre en péril les 162 objets classés dans l’inventaire fédéral des paysages (IFP) pour une production aussi ridicule n’a rien à voir avec l’intérêt national.
Dans la phase de consultation de l’ordonnance, la Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage CFNP, chargée d’éclairer le Conseil fédéral, avait dénoncé ce qu’elle appelle de ses propres mots une « absurdité » et demandé que la limite de 215 GWh soit fixée comme seuil de l’« intérêt national ». L’avis des experts a tout simplement été balayé d’un revers de la main.
La notion d’« intérêt national » pour les énergies renouvelables découle de la loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage (LPN). Il s’agissait alors, en pleine guerre froide, de permettre des constructions dans des objets protégés à des fins de défense nationale. Le message du Conseil fédéral du 2 décembre 1965 est catégorique à ce sujet et précise également (page 108) que même dans ces cas exceptionnels relevant de la défense militaire, il y a lieu de ménager le plus possible le paysage en question. Le Conseil fédéral a, ce jour, vidé ce concept de toute substance et de toute crédibilité.
Quant aux dispositions de l’ordonnance sur l’encouragement de la production d’électricité issue d’énergies renouvelables, elles constituent une preuve évidente que la promesse de campagne de 40 francs d’augmentation des coûts ne pourra pas être tenue. Pire, en subventionnant à hauteur de 21.5 centimes le kWh d’électricité éolienne contre seulement 11 centimes pour le photovoltaïque, le Conseil fédéral encourage les énergies les moins performantes et les plus destructrices pour l’environnement. Cette utilisation de l’argent public est aux antipodes des principes d’économicité et d’efficacité ancrés dans la loi sur les subventions.
En tentant par tous les bricolages juridiques possibles à faire passer de force l’énergie éolienne au détriment de l’ordre légal suisse, le Conseil fédéral viole l’esprit de la loi et la volonté populaire. Il donne une fois de plus la preuve que l’éolien ne peut être imposé à la population suisse sans bafouer l’ordre juridique et sans détruire le peu de paysages encore préservés, bases de notre identité nationale et de notre tourisme. Dans un si petit pays aussi densément bâti, où la lutte contre le mitage du territoire est devenue une priorité par la volonté populaire, il y a lieu de privilégier les autres formes d’énergie renouvelable, au premier rang desquelles figure l’hydraulique et le solaire.